Mon travail musical tient, à vrai dire, de l’Auberge espagnole. Il est traversé par les rencontres, les émotions, la fabuleuse diversité des rythmes et des sons. Des obsessions aussi sans doute… sûrement. J’aime aussi que la musique puisse raconter une histoire, c’est mon côté auteur et comédien. Aidé par les possibilités de la MAO, j’explore des chemins de traverse, hors des formats plus contraints de la chanson. Je fouille, je m’amuse, parfois je m’y perds. Mais qu’importe.
GWERZ DARVOUD LANDEDA
C’est dans les cahiers manuscrits de Jean de Penguern, un des collecteurs de traditions populaires comme le XIXème siècle en a vu courir sur les chemins bretons, juge de paix de son métier, que l’on trouve le texte de cette gwerz. La gwerz est un des modes de la poésie populaire en Bretagne. Le terme « Complainte » est une traduction fréquente mais il ne recouvre pas tout le champ d’application des Gwerzioù. L’Histoire, la religion, les amours ( souvent malheureuses, il est vrai ) sont aussi des thèmes courants. Le fait divers est aussi une grande source d’inspiration. Comme partout ailleurs et de tout temps, on tend l’oreille au croustillant, au cruel, au tragique. Les nouvelles du jour ou de la veille, du mois ou de l’année se répandent ainsi le long des routes, transmises de bouche à oreilles. On se l’approprie parfois. Un meurtre est un meurtre, il suffit parfois de changer les noms et d’adapter une autre mélodie.
Gwerz Darvoud Landeda est à placer dans la catégorie événements tragiques. Les faits sont avérés et dûment répertoriés dans les registres. Darvoud signifie « accident ».
Seize hommes, quinze de Landéda et un Lannilisien, se noient face à la grève de Traon Bizin ce 9 février 1762 en convoyant une batelée de bois destinée aux troupes du Fort Cézon qui garde l’entrée de l’Aber-Wrac’h. Ils le font dans le cadre de la Corvée qui oblige les paroisses à subvenir à certains besoins de l’armée.
Il est indiqué que le texte est une ré-écriture. La version originale, collectée par Jean de Penguern, possédait plus de couplets et amenait sur les rives de Saint-Pol-de-Léon, loin de l’incident donc. On s’approprie le naufrage, tant il n’est pas rare près des côtes.
Le responsable de cette réécriture s’appelle François Dizerbo, de son nom de plume, Fañch ar Roz, et il est né à Landéda. Instituteur de métier, il est mort à Plougasnou en 1932.
ALAN AL LOUARN / LA GUEULE OUVERTE
Chant épique s’il en est, collecté par Hersart de la Villemarqué au 19ème siècle dont on retrouve paroles et partition dans l’œuvre de sa vie, le » Barzhaz Breizh « . Il relate le combat qu’Alan Barbe-Torte, seigneur breton du Xème siècle encore surnommé Alan le Renard ( Louarn ), a livré aux envahisseurs vikings qu’il aurait allègrement massacré du côté de Dol de Bretagne
J’en ai fait deux versions : la première, philharmonique ( et allons-y ! ), retrace musicalement les différents moments du combat, c’est du moins mon intention première.
La seconde ( La gueule ouverte ) découle de la première et présente une interprétation toute personnelle de la mélodie d’origine sur laquelle j’ai écrit des paroles au sujet d’un endroit qui m’est cher : la rade de Brest.